Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Bonjour à tous !
 
Bienvenue sur ce nouveau blog "Un jour, Un sculpteur" !
 
Je commencerai sans aucune impartialité 😜 par ma "chouchoute" entre tous. Même si le travail d'autres me passionne presque tout autant, aucune sculpture ne me touche autant que celle de Germaine Richier (1902-1959).  Une seule note sur cette artiste majeure, l'une des plus grandes sculptrices du XXème siècle, ne suffisant pas, je propose donc de commencer par m'attarder sur les premières années jusqu'à 1945,  puis reviendrai sur elle ultérieurement dans quelques jours. 
 
 
 
"Je ne cherche pas à reproduire un mouvement. Je cherche plutôt à y faire penser. Mes statues doivent donner à la fois l'impression qu'elles sont immobiles et qu'elles vont remuer ". 
Propos recueillis par Yvon Taillandier, "On fait toujours la même sculpture, juin 1959.
 
Germaine Richier, par Ida Kar, 1954

 

Germaine Richier est née à Grans près d'Arles, en 1902. 
Après avoir suivi les cours de Louis-Jacques Guigues (formé par Rodin), aux Beaux-arts de Montpellier de 1920 à 1926, elle devient l'élève d'Antoine Bourdelle (ancien praticien de Rodin) à Paris, jusqu'à la mort de celui-ci en 1929. 
L'enseignement de Bourdelle sera déterminant pour Germaine Richier, elle disait elle-même " Tout ce que je sais, c'est Bourdelle qui me l'a appris." Elle apprendra auprès du maître la technique de la triangulation consistant à marquer des repères sur la structure du squelette et travaillera toute sa vie à l'aide de cette technique. Formée à " la dure école du buste ", ainsi qu'au travail d'après nature, la figure humaine restera l'axe central de toute son oeuvre.
 
Pendant une première période que nous pouvons définir comme réaliste, durant laquelle l'artiste multiplie les études d'après nature, les bustes et les nus, son Loretto, réalisé en 1934, est une oeuvre décisive.
 
Loretto - Germaine RICHIER 1934

 

 
Germaine Richier commence alors à créer un langage bien à elle et à explorer la richesse expressive du corps humain. Loretto, bien que de facture classique et réaliste initie déjà la singularité des oeuvres à venir : cet adolescent gracile possède paradoxalement un ancrage robuste des pieds dans le sol, une puissance expressionniste apparaît, renforcée par certaines disproportions (mains, pieds), et l'harmonie du contrapposto se trouve rompue par l'aplomb vigoureux de l'ensemble.
Cette figure sera reprise quelques années plus tard avec Juin 1940 dont l'expressionnisme sera davantage exacerbé.
De 1934 à 1939, Germaine Richier expose régulièrement à Paris et reçoit une médaille d'or lors de l'exposition internationale de Paris en 1937, ainsi qu'à New-York où elle a déjà obtenu le Prix Blumenthal de sculpture en 1936.
 
Une autre oeuvre traduisant l'émancipation de Richier vis-vis des représentations classiques est sa Pomone, 1945.
 
Pomone (Germaine RICHIER - 1945)
Ancienne divinité étrusque, des fruits et des vergers, traditionnellement représentée sous les traits d'une jeune fille joviale, portant un panier de fruits et de fleurs, la Pomone de Richier présente une allure robuste. C'est la plantureuse modèle Bouboule qui avait déjà posé en 1939 pour le Nu ou La Grosse, qui revient poser dans l'atelier de Germaine Richier à Zurich et permet à celle-ci d'aborder le thème si classique de Pomone en une allégorie de la gourmandise. 
 
Le Nu ou La Grosse (Germaine RICHIER - 1939)

 

Ainsi, cette Pomone, dont les formes généreuses traduisent l'abondance de la nature, croque un fruit, jouissant pleinement de ce que celle-ci lui offre.
Il est à noter un point important, Richier s'est probablement inspirée d'un de ses plus proches amis, le sculpteur italien Marino Marini dont Pomone était un théme fétiche. Si les influences mutuelles entre les deux artistes sont vraies, il n'en reste pas moins que Germaine Richier s'approprie pleinement le thème en explorant une voie qui lui est propre.
 
Les années de seconde guerre mondiale ont contribué à renouveler profondément son langage sculptural, son travail traduisant son malaise devant la guerre et sa vision tragique d'une société mise à mal. Installée alors en Suisse, à Zurich, à partir de 1939 jusqu'à son retour à Paris en 1946, avec son mari le sculpteur suisse Otto Bänninger, cette période inaugurera une représentation du corps humain ouverte au règne animal. Ce thème de l'hybride sera crucial et évoluera à travers une sculpture à mi-chemin entre le monde humain et végétal.
Ainsi comme Valérie Da Costa le rappelle: 
" Germaine Richier voit la vie en toute chose, une pierre, une branche, une feuille. Cette dimension animiste est centrale dans l'élaboration de sa sculpture car elle lui permet de comprendre comment elle associe un homme à un arbre, une femme à une feuille. Faire une sculpture signifie pour elle insuffler la vie. " (Germaine Richier, La Magicienne, aux éditions Hazan, 2019.
 
Le crapaud, 1942, inaugure cette dimension hybride qui sera un aspect caractéristique de ses oeuvres. La fusion des règnes humain et animal permet à Germaine Richier d'explorer une voie nouvelle.
 
Le Crapaud, Germaine Richier, 1942

 

 
Ce support idéal lui permet de renforcer un expressionnisme singulier où, l'étrangeté et le fantastique traduisent autant l'inquiétude de l'artiste pour son époque que son attrait pour la nature en tant qu'élément indissociable de l'humain. 
 
L'Homme-Forêt, Germaine Richier, 1945
Quant à L'Homme-Forêt, 1945, cette oeuvre intégre cette fois-ci directement une branche d'arbre qui sera moulée pour former un bras, expérience qu'elle renouvellera avec le Berger des Landes, 1951, composé à  partir d'un morceau de brique mêlé à du ciment poli par la mer, ou l'Eau, 1954, dans laquelle un col d'amphore sera intégré pour former une tête et une évocation de chevelure.
 
Mais nous reviendrons une autre fois sur les oeuvres de l'après-guerre pour explorer l'évolution du travail de cette immense artiste.
 
 
 
Sources :
Germaine Richier, Rétrospective, KunstMuseumBern, éditions Wienand 2013
Germaine Richier La Magicienne, éditions Hazan, 2019
Germaine Richier, Paroles d'artistes, éditions Fage, 2017
Musée Fabre, Montpellier.
Wikipédia
Tag(s) : #argile, #art, #modelage, #sculpture

Partager cet article

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :